Kerdrel fait pipi sur les évêques de France

C’est un article très amusant que nous livre Yves de Kerdrel dans le Figaro.

Le voilà reparti en croisade contre les évêques de France, leur reprochant leur interprétation des paraboles, énonçant enfin la vraie voie kerdrélique d’interpréter les Ecritures. Nouvel ayatollah de la parabole des talents, il n’hésiterait pas à envoyer tout l’épiscopat français en Chine, pour leur apprendre à bosser !

Cette même voie kerdrélique qui l’avait fait remarquer il y a deux ans, quand il soutenait la « voix frèle » de Laurence Parisot sur le CNE, vilipendant au passage la « dérive populiste » de Thierry Breton et Renaud Dutreil. Ou quand, cette année, il proposait de supprimer d’un coup l’aide médicale d’Etat à tous les clandestins. Ce qui prouve à l’évidence la hauteur des conceptions sociales Kerdréliques, à mille lieux de celles de ces vilains gôchistes d’évêques de France !

Sacré Kerdrel ! Mais où va-t-il chercher tout ça ?! Possiblement dans les prestigieux lobbies dans lequel il grenouille avec constance, la très sélect FAF, le mystérieux groupe de Bilderberg, ou tout simplement le MEDEF !

(du même tonneau : l’article kerdrélique de 2006 sur le dimanche)

 
Lire aussi : l’excellent article de KozToujours

Le Figaro, La chronique d’Yves de Kerdrel 18/11/08

Les contre-apôtres du travail dominical

Les évêques de France sont des gens admirables. D’abord plus de deux siècles après la Révolution, ils se font toujours sacrer, sans avoir besoin d’aller à Reims, comme les premiers secrétaires du Parti socialiste. Ensuite, malgré la séparation de l’Église de l’État, ils ne peuvent toujours pas être nommés à la tête d’un diocèse sans que le ministre de l’Intérieur leur accorde sa bénédiction. Enfin, ils ont toujours un avis sur tout, et ils ont un certain talent pour le faire partager.

Il y a une trentaine d’années, ils avaient jugé utile de s’élever contre les efforts faits par la France pour sécuriser le pays en se dotant d’une force de dissuasion nucléaire. Et ils étaient montés au créneau – plus qu’en chaire – pour dénoncer cette course aux armements. Heureusement le chef d’état-major de la Marine de l’époque, l’amiral de Joybert, avait assez rapidement clos cette polémique en les invitant, dans une lettre ouverte publiée par Le Figaro, à remplir leurs églises désertées plutôt que les colonnes des journaux, par des propos naïfs sur l’horreur de l’arme atomique.

Il n’y a pas si longtemps, ils ont renouvelé leurs exploits rhétoriques en prenant le parti, à de multiples reprises, de la régularisation des sans-papiers, voire d’une im­migration non choisie, alors même que certains à gauche expliquent depuis longtemps que «la France ne peut accueillir toute la misère du monde».

Sans doute désinhibés par un président de la République qui parle avec facilité de religion, voici nos apôtres d’aujourd’hui démangés à nouveau par la volonté de donner leur opinion sur la crise financière, la précarité de l’emploi et sur un sujet par lequel ils se sentent particulièrement concernés : le travail dominical. Mgr Vingt-Trois, le cardinal-archevêque de Paris et président de la conférence des évêques de France, a récemment affirmé lors d’un discours solennel : «Si des dispositions législatives généralisaient le champ du travail dominical, les dommages humains et sociaux qui en découleraient se­raient sans commune mesure avec le profit économique qui peut en résulter. Ce serait une mesure supplémentaire dans la déstructuration de notre vie collective qui ne toucherait pas seulement les chrétiens.»

L’archevêque de Paris ne nous renvoie à aucune référence biblique. Il aurait pu par exemple rappeler qu’après avoir créé le monde, le septième jour, Dieu se reposa. Il aurait pu souligner que d’autres religions sont plus strictes en matière de respect du repos hebdomadaire. Non ! ce qui le gêne, c’est que le «gagner plus ne doit pas devenir l’objectif principal de l’existence». Là il est effectivement dans son rôle, même s’il oublie que la parabole des talents nous rappelle que c’est celui qui gagne le plus d’argent qui figure parmi les élus du Maître.

Le problème, c’est que le sujet du travail dominical n’est pas une question de rendement maximal, de gain optimal, ou d’un néostakhanovisme, voire d’une société rongée par le matérialisme. Non, cette question, c’est justement celle qui constitue le fil rouge des Écritures, c’est celle de l’homme et de sa liberté. Est-il normal que la France soit l’un des derniers pays qui réglemente de manière drastique le travail le dimanche, interdisant ceux qui souhaitent ouvrir leurs échoppes, petites ou grandes, de le faire ? Est-il normal que la liberté de travailler, donc de s’épanouir et de s’émanciper, se trouve ainsi entravée ? Est-il normal en 2008, qu’à un être humain qui veuille de son libre choix travailler le dimanche, on oppose une réglementation obsolète ?

Un pays qui retient les énergies de ceux qui veulent produire, construire ou vendre, est un pays qui protège les individualismes, les rentes aux dépens de la création de richesse pour tous. Car le travail dominical n’a rien à voir avec la vision d’horreur qu’en donnent ses détracteurs. Il ne s’agit pas d’ouvrir de force tous les commerces et d’y pousser également de force des consommateurs dépourvus de pou­voir d’a­chat. Il s’agit de permettre à ceux qui veulent profiter de telle situation géographique ou de telle opportunité sectorielle, de créer plus d’activité, donc plus d’em­plois, et in fine plus de richesse pour la collectivité. Les Français l’ont bien compris. Un récent sondage réalisé par Le Journal du dimanche faisait ressortir que deux tiers des Français étaient prêts à travailler le dimanche. Cela veut dire qu’ils sont plus nombreux en­core à en accepter de fait l’idée.

Pierre Daninos écrivait «qu’il n’est pas interdit de penser que si l’Angleterre n’a pas été envahie depuis 1066, c’est que les étrangers redoutent d’avoir à y passer un dimanche». C’était avant que les Anglais n’évoluent et comprennent l’intérêt de libéraliser la plus grande part du champ économique, à commencer par le travail. Aujourd’hui les Britanniques travaillent 25 % de plus que les Français et leur niveau de vie est supérieur d’un quart. Surtout jamais la pauvreté n’a autant reculé outre-Manche.

Au moment où le Secours catholique vient de rappeler la détresse cachée en France, donc la nécessité de créer plus de ri
chesse pour tous, nos évêques devraient faire preuve de plus de discernement dans leurs propos. Et de se rappeler les limites que leur fixent les Évangiles : «Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui lui appartient.»

 

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