Question orale sans débat d'Axel Poniatowski

Malgré le sérieux apparent de la chose, il se passe à l’Assemblée un certain nombre de débats assez risibles par l’étalement d’informations fausses, d’inexactitudes, de lieux communs. Ci-dessous la croustillante intervention du 29/04/08 d’Axel Poniatowski, député du Val d’Oise.

En italique, nos commentaires.

Mardi 29 avril 2008 – Question orale sans débat d’Axel Poniatowski, Député du Val d’Oise

OUVERTURE DES COMMERCES LE DIMANCHE DANS LE VAL-D’OISE 

M. Axel Poniatowski – Madame la ministre, je me réjouis que vous soyez amenée à me répondre, étant donné les responsabilités importantes que vous avez occupées naguère dans l’établissement public de Cergy-Pontoise.

La question de l’ouverture des commerces le dimanche, qui a ressurgi récemment dans le débat politique et fait l’objet d’un examen approfondi en vue d’une éventuelle modification des règles en vigueur, se pose avec une particulière acuité dans le Val-d’Oise.

Dans le permis de construire du centre commercial Art de vivre situé à Éragny-sur-Oise était insérée une clause selon laquelle les magasins qui s’y installeraient bénéficieraient de l’autorisation d’ouverture le dimanche. A la suite d’une action en justice engagée par le syndicat FO, il s’est avéré que cette clause était illégale. Mais les conséquences sont catastrophiques.

Information qui demeure à prouver, tellement elle est absurde : Comment une autorisation de construire pourrait-elle contenir la possibilité de contrevenir au Code du Travail ? Comment le Maire d’Eragny, compétent pour accorder un permis de construire, pourrait conférer un droit qu’il ne lui appartient pas de donner ? Et comment une autorisation de construire pourrait ne pas reconnaître le droit légal aux petits commerces qui y sont implantés d’ouvrir sans employer de salariés ? Certains ne s’en privent pas. Le Grand Cercle est, nous dit-on, une société familiale… Les membres de la famille pourront toujours venir aider.

La librairie Le Grand Cercle, neuvième librairie indépendante de France, va devoir procéder à 62 licenciements immédiatement, et, à terme, l’effectif actuel de 160 salariés serait réduit à 78 – 65 ETP. L’insuffisance du chiffre d’affaires, la disproportion de la surface commerciale et le coût des licenciements risque même d’entraîner le dépôt de bilan, soit la disparition des 160 emplois.

Actuellement, il y a 120 salariés ETP et non 160 comme l’indique Monsieur Poniatowski. La librairie va très bien, elle a annoncé l’année dernière la création d’un deuxième établissement et le retard pris pour son ouverture n’a rien à voir avec cette situation. Les salariés pourront donc être reclassés et ne pourront pas être licenciés.

En outre, le licenciement est juridiquement impossible. Le Grand cercle ne pourra pas se prévaloir de n’avoir pas respecté la Loi pour ensuite justifier un licenciement. C’est méconnaître le B-A-BA du Code du Travail que de poser une telle affirmation !

À Osny, pour le magasin Leroy Merlin qui emploie habituellement 200 collaborateurs et 50 étudiants le dimanche, l’ouverture dominicale représente 20 % du chiffre d’affaires hebdomadaire et fait bénéficier les salariés d’une prime d’intéressement de 150 %. Le centre commercial de l’Oseraie à Osny se trouve dans la même situation que le centre Art de Vivre d’Éragny.

Encore une entreprise familiale ! Leroy-Merlin appartient au groupe Adéo et donc à l’association familiale Mulliez (8 milliards d’Euros de Chiffre d’affaires).

Etant la seule enseigne de bricolage de la zone commerciale de l’Oseraie, la fermeture induira nécessairement et mécaniquement un report en semaine de la clientèle. Où est le problème ?

Il n’est pas raisonnable qu’en Ile-de-France, les enseignes de bricolage, outillage, décoration, ameublement et loisirs soient fermés le dimanche. Les actions judiciaires engagées par FO menacent la pérennité des entreprises et vont provoquer des plans de licenciements alors même que le personnel est largement favorable au fait de travailler ce jour-là.

Erreur impardonnable pour un fin connaisseur de la situation comme M. Poniatowski. L’ameublement bénéficie de la Loi Chatel du 3 janvier dernier et de l’amendement Debré. Souvenez-vous, M. Poniatowski, une loi qui permet d’employer des salariés le dimanche sans aucune contrepartie, sans volontariat suite à une boulette de ses promoteurs que M. Mallié ne corrige curieusement pas dans sa proposition.

M. Poniatowski devrait se renseigner : quelles sont les enseignes qui sont fermées en Ile de France ?! Elles sont toutes ouvertes. Castorama, condamné, continue à ouvrir en dépit d’une astreinte de 90.000 Euros. Les seules à avoir fermé sont les enseignes de vente d’électro-ménager qui n’ont pas vu leur chiffre d’affaire baisser sauf lorsqu’elles sont directement confrontées à d’autres enseignes qui ouvrent le dimanche comme c’est le cas à Eragny où Planet Saturn a perdu des parts de marchés sur les CD, les jeux vidéos du fait du maintien de l’ouverture du Grand Cercle à moins de 200 mètres.

C’est l’Etat qui est garant de l’égalité et de la légalité. Que fait-il ?

Je souhaite donc que M. Novelli demande sans attendre au préfet du Val-d’Oise de prendre un arrêté régularisant, au moins temporairement, la situation de ces centres commerciaux afin d’éviter une catastrophe sociale.

Décidément, la régularisation est à la mode ! Encore un arrêté illégal à prendre qui serait annulé aussi sec ?! M Poniatowski ne pourrait-il pas demander à Monsieur le Préfet de faire appliquer la Loi avec les moyens de l’Etat pour assurer l’égalité entre les opérateurs économiques ?

D’autre part, à la suite des travaux du groupe d’études sur ce sujet, notre collègue Mallié a déposé une proposition de loi que j’ai cosignée : dans quel délai elle pourra-t-elle être inscrite à l’ordre du jour prioritaire de l’Assemblée nationale ?

M Poniatowski est bien pressé ! Avant de la signer, il faudrait d’abord en comprendre les effets ! Quid des deux rapports commandés par le gouvernement actuel comme le précédent, notamment les deux avis du Conseil Economique et Social ? 


Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d’État chargée du commerce extérieur – En vertu du principe de séparation des pouvoirs, il est évidemment impossible de s’immiscer dans les affaires pendantes devant les juridictions, même si leur déroulement est suivi avec la plus grande attention par le ministère de l’économie et celui du travail ; votre demande que le préfet du Val-d’Oise prenne les arrêtés nécessaires pour consolider la situation juridique des magasins et l’emploi de leurs salariés a été transmise à Xavier Bertrand.

Il
n’en demeure pas moins que des élus n’ont pas hésité d’écrire au Président du Tribunal de Grande Instance de Pontoise s’agissant du Grand Cercle qui est la seule enseigne à avoir été condamnée, mais avec un délai de quatre mois avant l’application des astreintes réduites à 5.000 Euros par dimanche, là où le code du travail prévoit une amende par salarié au profit de l’Etat de 7.500 Euros…

D’une manière plus générale, le souci du Gouvernement est d’adapter l’ouverture des magasins à la situation réelle de notre économie et de la société, tout en préservant l’équilibre entre les différentes formes d’offre commerciale. C’est un dossier sensible tant pour les salariés que pour les consommateurs, aussi bien à Plan de campagne, dans le sud de la France, que dans votre région. Les services de l’État expertisent l’impact des propositions formulées par le Conseil économique et social et par la Commission pour la libération de la croissance française, et M. Novelli ne manquera pas de vous tenir informé de la suite qui sera donnée à ces premières analyses.

Nous sommes donc particulièrement attentifs au retour de ces nouvelles expertises. Il reste à espérer que Madame IDRAC pourra demander celle de l’OFCE et se rapprochera des parlementaires européens et de la Commission européenne qui sauront leur rappeler la Résolution du Parlement Européen du 12 décembre 1996. La seule expertise qui n’est pas, à notre connaissance connue, est l’impact environnemental de la mesure, notamment en matière de pollutions de toutes sortes. La fondation de Nicolas Hulot a été interrogée à ce sujet il y a plusieurs mois, mais pas de réponse à ce jours.

La réponse de Mme Idrac demeure contradictoire avec celle de Mme Lagarde, apportant le soutien du gouvernement à la proposition Mallié.

Je remercie M. Mallié d’avoir déposé une proposition de loi sur le sujet et j’espère comme vous que le Parlement aura prochainement à en débattre. Nous avons en effet à améliorer un système qui est devenu illisible et injuste, avec 180 possibilités coexistantes de dérogations au repos dominical. C’est un sujet de grande importance, puisque tous secteurs d’activité confondus, 5,8 millions de salariés déclarent travailler le dimanche, dont un noyau dur de 3,4 millions, ainsi que 1,6 million de non salariés.

Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage, vieille coutume toujours aussi efficace !

Un système illisible ? La proposition Mallié ne fait qu’ajouter des dérogations nouvelles en permettant qu’elles soient en outre implicites. Elle complexifie encore plus la situation en rajoutant encore à l’édifice. Elle rend le système moins sûr au niveau juridique, une dérogation pouvant être annulée plusieurs années après qu’elle ait été accordée. Un système injuste ? Injuste, que les salariés, la société, les familles, les petits commerçants voient leur vie personnelle protégée des appétits des grandes enseignes et de leurs actionnaires ? Allons !

M. Axel Poniatowski – J’aurais aimé que vous nous annonciez officiellement l’inscription rapide de ce débat à notre ordre du jour… Le préfet des Bouches-du-Rhône a appelé lui-même hier dans son communiqué de presse à une discussion de cette proposition de loi dans les meilleurs délais. L’évolution de la législation est attendue par l’ensemble des parties en Ile-de-France, enseignes, salariés et consommateurs – qui, ayant souvent une heure et demie de trajet matin et soir pour aller travailler, ne peuvent évidemment faire leurs courses qu’en fin de semaine.

M Poniatowski doit travailler le dimanche ! Il faudrait qu’il puisse aller en province pour constater que la fermeture dominicale se supporte sans difficulté, bien que les temps de trajet sont aussi longs. Pour mémoire, dans les zones urbanisées du département du Val d’Oise, il faut moins de 7 kms pour trouver une grande enseigne dans l’un des secteurs d’activité concernés. Elles sont toutes implantées le long des principales artères. Vous constaterez que vous devrez faire bien des kilomètres si vous habitez dans les zones rurales.

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